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Pourquoi il est essentiel d’instaurer la sécurité psychologique en enseignant dans un contexte de soins de santé en période postpandémie

  
https://www.canadian-nurse.com/blogs/cn-content/2024/03/18/psychological-safety-teaching-post-pandemic

Comment les enseignants peuvent contribuer à créer une culture positive entourant l’apprentissage continu

Par Jennifer Dale-Tam
18 mars 2024
istockphoto.com/FatCamera
La participation à un environnement d’apprentissage défavorable pourrait dissuader les infirmières et infirmiers de rechercher les ressources pédagogiques nécessaires. Toutefois, si vous avez recours aux stratégies décrites dans cet article en milieu clinique, ils se sentiront plus à l’aise de contribuer à vos côtés.

Il est essentiel de créer des espaces d’apprentissage sûrs pour le personnel infirmier. Bon nombre d’entre nous craignent de paraître ineptes ou incompétents aux yeux de nos pairs si nous ne connaissons pas la réponse à une question. Pourtant, on s’attend à ce que les infirmières et infirmiers se remettent en question lorsqu’ils n’ont pas les connaissances, les compétences ou le jugement nécessaires pour accomplir une tâche tout en s’occupant d’un patient ou d’une patiente. C’est là que le rôle de l’enseignant ou de l’enseignante peut avoir un effet positif dans un contexte clinique, qu’il s’agisse d’une instructrice ou d’un instructeur clinique, d’un précepteur ou d’une préceptrice, d’une infirmière enseignante ou d’un infirmier enseignant. J’utiliserai le terme « enseignant ou enseignante » pour désigner tous ces rôles.

Il est encore plus nécessaire pour les enseignants, à la suite de la pandémie de COVID-19, de créer des espaces sûrs permettant aux infirmières et infirmiers d’apprendre, d’évoluer et de réfléchir. La pandémie a eu un effet négatif sur la santé mentale de nombreux membres du personnel infirmier en exercice. Les infirmières et infirmiers nouvellement diplômés n’ont pas eu la même exposition aux milieux cliniques que celles et ceux formés avant la pandémie. Pour celles et ceux qui ont obtenu leur diplôme durant la pandémie, il est encore plus important d’identifier leurs besoins d’apprentissage et de rechercher les ressources appropriées. Pour ce faire, ils ont besoin d’un contexte d’apprentissage favorable.

Dans cet article, je donne d’abord une définition de la « sécurité psychologique », puis je présente des stratégies visant à créer un espace sûr pour le personnel infirmier où apprendre et contribuer.

La sécurité psychologique est la capacité d’exprimer ses pensées et ses sentiments sans craindre les conséquences négatives pour l’image de soi, le statut ou la carrière. Cette définition est utilisée dans un formulaire d’évaluation des programmes d’enseignement des soins infirmiers que je supervise et qui a été rempli par plus de 840 membres du personnel infirmier. Sur ces 840 infirmières et infirmiers, seules deux personnes ont répondu par la négative à la question s’informant de leur sentiment de sécurité pour exprimer leurs pensées. Près de 100 % des infirmières et infirmiers se sentent en sécurité dans leur environnement d’apprentissage grâce à certaines des stratégies décrites dans cet article, que j’utilise et que j’ai transmises à mes pairs.

La sécurité psychologique est un des principes de l’enseignement fondé sur la simulation, qui est l’une des nombreuses méthodes utilisées pour former les infirmières et infirmiers. Bon nombre des stratégies utilisées dans la formation par simulation sont applicables à d’autres techniques de formation clinique, telles que l’apprentissage par observation, la démonstration et la formation en cours d’emploi qui a lieu en milieu de travail. D’après mon expérience en tant que formatrice en simulation et infirmière enseignante, les stratégies suivantes se sont avérées utiles pour créer un espace d’apprentissage sûr pour les infirmières et infirmiers et les autres professionnels de la santé.

1. Séance préparatoire

Une séance préparatoire est organisée avant chaque séance de formation par simulation, mais elle peut également avoir lieu pour les séances de formation clinique. Il peut s’agir de préciser la durée de la séance, l’objectif de la séance d’apprentissage et le fait que l’on s’attend à ce que les participants posent des questions durant la séance préparatoire. Dans le cadre de votre rôle d’enseignante ou d’enseignant, il est utile de préciser si vous utilisez le questionnement comme méthode de participation et d’évaluation de l’apprentissage. Je poursuis en précisant qu’il n’y a pas de mal à dire « je ne sais pas » en réponse aux questions, mais que l’action suivante consistera à perfectionner les connaissances ou les compétences en trouvant la réponse.

2. Modélisation des rôles

Comme pour la déclaration précédente concernant les questions, lorsque les apprenants posent des questions auxquelles je n’ai pas de réponses, je déclare : « Je ne sais pas, mais je vais me renseigner », ou « Trouvons la réponse ensemble. ». Cela démontre que nous n’avons pas la réponse à tout. Nous sommes des êtres humains et c’est tout à fait normal de ne pas tout savoir. L’étape suivante est de trouver la réponse. Cette stratégie permet de modéliser un comportement professionnel approprié et d’instaurer un climat de confiance avec nos apprenants.

3. Reconnaissance et normalisation

Les apprenants peuvent manifester des sentiments ou des comportements de peur ou d’anxiété au cours d’une séance de formation. Si nous rejetons, ignorons ou minimisons ces sentiments, nous ne reconnaissons pas l’être entier, ou la personne humaine en nous, qu’est l’infirmière ou l’infirmier. La crainte ou l’anxiété peuvent entraver l’apprentissage. Le fait de reconnaître ces sentiments et de les normaliser peut faire en sorte que les apprenants se sentent plus en confiance. Ma déclaration de suivi de la reconnaissance et de la normalisation d’un sentiment est la suivante : « Au fil de cette séance de formation, nous travaillerons ensemble pour que ces sentiments s’atténuent ».

4. Déclarations réalistes

Certaines de ces déclarations peuvent sembler stéréotypées, mais je les ai trouvées utiles dans mes séances de formation :

  • « En tant que membres du personnel infirmier, nous sommes tous responsables des soins que nous fournissons; par conséquent, si vous ne savez pas comment faire quelque chose, vous devez le découvrir en utilisant les ressources à votre portée. »
  • « Nous sommes tous des êtres humains et, en tant que tels, nous ne disposons pas d’une capacité cognitive infinie pour nous souvenir de tout ce que nous apprenons. Mais nous devons reconnaître que nous ne savons pas quelque chose et rechercher les ressources qui nous aideront à l’apprendre. »
  • « Comme je suis votre enseignante ou enseignant, je suis à votre disposition pour vous guider, surtout si vous venez de vous joindre à la profession. »

La participation à un environnement d’apprentissage défavorable (où le fait de ne pas savoir quelque chose était mal vu ou poser des questions était un signe d’échec) pourrait dissuader les infirmières et infirmiers de rechercher les ressources pédagogiques nécessaires,. Elle ou il risque de cacher son manque de connaissances, ce qui pourrait entraîner des soins aux patients non sécuritaires. Toutefois, si vous avez recours aux stratégies décrites dans cet article en milieu clinique, ils se sentiront plus à l’aise de contribuer à vos côtés.

La recherche démontre que les connaissances et les compétences s’amenuisent au bout d’environ trois mois lorsqu’elles ne sont pas utilisées régulièrement, mais qu’elles peuvent être rapidement remises à niveau grâce à des séances de formation supplémentaires plus courtes. Ces séances peuvent prendre la forme de consultation de ressources (telles que les politiques de l’hôpital ou les directives cliniques exemplaires) ou de mise en lien avec l’infirmière ou l’infirmier enseignant en milieu de travail. Par exemple, j’ai travaillé avec des infirmières et infirmiers de mon organisation sur la mise à niveau de leurs compétences cliniques. Au début de chaque séance sur les compétences dans leurs unités cliniques, j’utilise la séance préparatoire, soit la modélisation du rôle, la reconnaissance et la normalisation des sentiments comme stratégies pour créer un espace sûr. Trois mois après le début de l’initiative, 270 infirmières et infirmiers ont participé aux séances et leur ont attribué 9,84 étoiles sur 10 en fonction de leur expérience. Les infirmières et infirmiers m’abordent parce qu’ils se sentent en sécurité lorsqu’ils posent des questions et savent qu’il n’y a aucun mal à ne pas connaître toutes les réponses.

Bref, il est pratiquement impossible pour une infirmière ou un infirmier de tout savoir sur sa pratique et il est normal de ne pas tout savoir. Mais nous devons chercher les ressources pour parfaire les connaissances, les compétences et le jugement requis. Les enseignants en milieu clinique jouent un rôle essentiel dans l’établissement d’une culture d’apprentissage continu et de la responsabilisation en faisant régner la sécurité psychologique dans les espaces d’apprentissage.


Jennifer Dale-Tam, inf. aut., M. Sc. inf., CSI(C), CCSNE, CHSE, est infirmière enseignante en milieu de travail (simulation) à l’Hôpital d’Ottawa.

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