Blog Viewer

Observer une mauvaise utilisation de l’ÉPI et en tirer une expérience transformatrice

  
https://www.canadian-nurse.com/blogs/cn-content/2021/06/14/how-witnessing-the-incorrect-use-of-ppe-became-a-t
juin 14, 2021, Par: Jeshna Kumari
a nurse wearing full PPE, including, gown, gloves, eye glasses, mask, face shield and hair cap
istockphoto.com/FatCamera
Compte tenu de la complexité et du rythme rapide de prestation des soins infirmiers, l’utilisation correcte de l’équipement peut être difficile à mettre en pratique en raison d’obstacles personnels, de conditions variables et de contraintes de temps.

L’utilisation correcte de l’équipement de protection individuelle (ÉPI) et du matériel médical est cruciale pour la prestation efficace de soins aux patients et pour la prévention et le contrôle des infections. C’est un élément essentiel de la pratique infirmière. L’ÉPI est une mesure servant à réduire l’exposition aux maladies infectieuses dans les soins de santé. Toutefois, lorsque j’ai commencé mon stage clinique dans un hôpital de soins actifs, j’ai remarqué de nombreuses disparités entre la pratique optimale et l’utilisation réelle de l’ÉPI et du matériel médical parmi le personnel infirmier. Dans le présent article, je décris les situations que j’ai observées le premier jour de mon stage dans un hôpital de soins actifs. Par la suite, je discute des facteurs en jeu dans ces situations et je réfléchis aux leçons apprises.

Une série d’événements pour le moins surprenants

Le premier jour de mon stage, on m’a jumelée à une infirmière. À cette occasion, j’ai observé des pratiques qui m’ont alarmée. Nous avons commencé la journée par l’évaluation des signes vitaux. L’infirmière que j’accompagnais n’a pas nettoyé l’équipement, avant et après avoir examiné les patients, ni entre chacun d’eux. Cette pratique m’a déroutée, car la première étape qu’on enseigne aux étudiants est de désinfecter l’équipement avant de procéder à une intervention, entre les consultations avec les patients et à la suite d’une intervention. Lorsque je me suis rendu compte que l’infirmière omettait cette pratique, je me suis demandé : « Sait-elle qu’elle doit nettoyer ce matériel? Est-elle consciente qu’elle omet l’étape du nettoyage, mais qu’elle continue de se servir du matériel? Cette pratique a-t-elle lieu normalement ou s’agit-il d’un cas isolé, aujourd’hui? Et l’infirmière comprend-elle les issues négatives pouvant découler de cette pratique pour l’état de santé des patients? »

Cette expérience m’a mise mal à l’aise, car j’avais l’impression que l’infirmière faisait courir aux autres patients, entre autres, le risque de contracter le SARM.

Au fil de la journée, j’ai aussi observé l’infirmière porter incorrectement l’ÉPI. Pendant que nous nous apprêtions à entrer dans une chambre d’isolement avec un patient atteint de staphylococcus aureus résistant à la méthicilline (SARM), l’infirmière n’a pas noué le cordon inférieur de sa blouse de protection. La directive clinique optimale sur l’ÉPI veut que les cordons du cou et de la taille soient noués fermement, après quoi, il est également important de veiller à ce que la blouse couvre entièrement le devant et l’arrière. Malheureusement, l’infirmière ne s’est pas conformée à cette pratique et est entrée dans la chambre du patient. En entrant, l’infirmière a pris les signes vitaux du patient, s’est appuyée contre le lit pour parler aux membres de sa famille, puis s’est promenée rapidement dans la chambre avec une blouse qui flottait dans l’air. Par conséquent, l’envers de la blouse a touché le lit, la table et les vêtements du patient. L’arrière de sa tenue de travail est aussi entré en contact direct avec l’environnement du patient. En sortant de la chambre, l’infirmière a tout de suite enlevé son ÉPI, n’a pas nettoyé le matériel médical et a poursuivi ses visites avec le patient suivant. Bien que la tenue de l’infirmière ait été potentiellement contaminée, elle s’est ensuite aussi assise sur des chaises dans l’unité et sur le lit d’autres patients, et elle a porté la même tenue jusque chez elle. Cette expérience m’a mise mal à l’aise, car j’avais l’impression que l’infirmière faisait courir aux autres patients, entre autres, le risque de contracter le SARM.

Au milieu de ces événements, une autre infirmière m’a déclaré : « Fais ce qu’on dit, et pas ce qu’on fait. » Cette déclaration m’a consternée, et je me suis demandé pourquoi ces infirmières agissaient d’une façon qu’elles jugeaient inadéquate. Face à ces interrogations, j’ai commencé à analyser le contexte des événements pour en comprendre l’origine.

Réflexion sur les facteurs ayant contribué aux événements

Compte tenu de la complexité et du rythme rapide de prestation des soins infirmiers, l’utilisation correcte de l’équipement peut être difficile à mettre en pratique en raison d’obstacles personnels, de conditions variables et de contraintes de temps. Par exemple, au cours des premières heures du jumelage, l’infirmière m’a fourni l’information sur l’unité et les médicaments à administrer aux patients. Pendant ce temps, elle assumait à la fois le rôle d’infirmière et celui d’instructrice. Bien que cette expérience se soit avérée précieuse pour moi, il lui restait peu de temps pour prendre les signes vitaux, procéder aux évaluations et administrer les médicaments. Par conséquent, son travail est devenu désorganisé, et elle a commencé à faire ses taches à la hâte et à se précipiter d’une chambre à l’autre. Dans la hâte de s’occuper des patients, l’infirmière peut avoir oublié d’utiliser correctement l’équipement ou estimé qu’elle manquait de temps pour le faire. Par ailleurs, c’était la première fois qu’elle encadrait une étudiante. Cette nouvelle expérience peut l’avoir déroutée, le temps étant déjà limité pour les soins aux patients, d’autant plus que j’étais sous sa responsabilité pendant tout son quart de travail.

De plus, cette journée là, l’unité était au maximum de sa capacité. On avait affecté six patients à cette infirmière, par rapport à son mandat habituel de cinq patients. Son temps était déjà limité en raison d’une surcharge de travail. Par conséquent, elle a donné priorité à l’administration des médicaments aux patients, ce qui peut l’avoir poussée à accorder une moindre attention à l’utilisation correcte de l’ÉPI.

Étant donné ces nombreux facteurs, j’ai appris que le personnel infirmier se concentre surtout sur les soins directs aux patients, comme l’administration des médicaments et les responsabilités au sein de l’unité. Toutefois, ces fonctions peuvent constituer des obstacles à la mise en œuvre de mesures adéquates de prévention et de contrôle des infections, comme un usage adéquat de l’ÉPI et le nettoyage du matériel médical.

Leçons apprises

  • Les dirigeants sont essentiels à la mise en œuvre du changement : Je me suis d’abord sentie désorientée parce que je n’étais pas suffisamment guidée pour suivre la pratique fondée sur des données probantes, comme on me l’avait enseigné pendant mes études. Toutefois, après mûre réflexion, j’ai acquis une perspective essentielle. J’ai appris que le leadership dont font preuve les infirmières et infirmiers dans les soins influe sur la façon dont ils assurent les soins aux patients et sur leur capacité à mettre en œuvre des mesures de prévention et de contrôle des infections. Ainsi, je me suis rendu compte que pour qu’un changement s’opère, il faut d’abord que les chefs de file, individuellement, transforment la culture et les attentes de l’unité, afin que les pratiques existantes puissent être reconstruites.
  • Les étudiants en soins infirmiers peuvent donner l’exemple : Cette idée a eu un effet sur mon apprentissage en tant qu’étudiante, car j’ai pris davantage conscience de mes gestes et j’ai choisi de montrer l’exemple. J’ai découvert qu’il m’incombe de prôner un environnement qui atténue le risque de transmission des infections. Par exemple, j’ai discuté de l’utilisation inadéquate de l’ÉPI avec ma professeure en soins infirmiers et la gestionnaire de l’unité, et j’ai rédigé un rapport sur la situation et proposé un plan d’action ultérieur. Par ailleurs, consciente que la culture de l’unité influence au quotidien les soins aux patients, j’ai discuté des attentes et de la charge de travail du personnel infirmier avec la gestionnaire de l’unité pour mieux comprendre en quoi la culture de l’unité contribue à la mise en œuvre de telles mesures par le personnel. Ma décision de montrer l’exemple a commencé à changer la dynamique de l’unité, car l’équipe soignante a pu constater l’engagement d’une étudiante à s’en tenir aux mesures de prévention et de contrôle des infections.
  • Le personnel infirmier doit gérer efficacement son temps : Dans ma position, j’ai également été sensibilisée au lien entre la pratique infirmière et le temps. Ce lien oriente la profession, car les soins infirmiers sont grandement assujettis aux contraintes de temps. En tant que prestataires de soins de première ligne, les infirmières et infirmiers doivent apprendre à gérer leur temps efficacement et à déléguer pour répondre aux besoins de leurs patients et à ceux de leurs collègues. Le jour de mon jumelage à l’infirmière, l’aspect temporel a été perturbé par de multiples inconvénients, ce qui a mené à des pratiques sous optimales. Il est donc essentiel pour moi, en tant qu’étudiante, d’apprendre à m’adapter et à gérer le stress efficacement afin de réagir aux conditions variables de façon opportune et posée.
  • Le personnel infirmier doit prendre soin de soi pour améliorer sa pratique : Je crois que la méditation est un outil important et efficace qui me permet de garder les pieds sur terre pendant les situations stressantes et qui m’aide à prendre conscience des gestes que j’accomplis. Ainsi, je suis plus à même de m’adapter rapidement aux situations changeantes, ce qui influence considérablement la qualité des soins que je fournis aux patients. Par conséquent, je poursuivrai mes séances de méditations de 20 minutes trois fois par semaine, et j’en augmenterai la durée, si mon emploi du temps me le permet. Je m’efforcerai également de faire part de mon expérience entourant la méditation à l’équipe interprofessionnelle. Ce faisant, non seulement je renforcerai ma capacité à gérer mon temps en développant des stratégies d’adaptation et en les améliorant, mais je guiderai aussi les autres qui voudront faire de même.

Même si elle s’est avérée décevante au début, ma première journée de jumelage à une infirmière dans un hôpital de soins actifs s’est révélée une bénédiction en soi, car j’en ai tiré certaines leçons essentielles qui sont fondamentales aux soins infirmiers. Je suis également reconnaissante d’avoir eu l’occasion de réfléchir à ces événements et je poursuivrai mon rôle de catalyseur du changement au sein de la profession.


Jeshna Kumari est en troisième année de baccalauréat en sciences infirmières à l’Université de Calgary. Elle assume actuellement une diversité de rôles de bénévole et de chef de file à l’université, à l’hôpital où elle est active, dans son quartier et sur la scène internationale. Jeshna Kumari mène également des recherches en santé de l’enfant et en santé familiale au Healthy Families Lab à Calgary, en Alberta, et milite avec ferveur pour ces populations dans le système de soins de santé.

#opinions
#préventionetcontrôledel’infection
#collaboration interprofessionnelle
#pratiqueinfirmière
#sécuritédespatients
#collaborationintraprofessionnelle
#featured
0 comments
178 views

Connectez-vous pour laisser un commentaire