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Soutenir les étudiant(e)s en sciences infirmières : chaque infirmière et infirmier a quelque chose à offrir

  
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mai 04, 2020, Par: Joanne Petersen
Nurses looking over a clipboard.
iStock.com/kupicoo

Messages à retenir

  • Appuyer la pratique des étudiants et étudiantes en sciences infirmières s’inscrit dans les normes professionnelles et constitue une préoccupation déontologique dont tout le personnel infirmier doit tenir compte.
  • L’auteure propose des conseils faciles et des astuces pratiques qui contribuent à une meilleure expérience d’apprentissage pour les précepteurs et les étudiants.
  • Créer le bon environnement peut aider les étudiants en sciences infirmières à réussir leur stage de fin d’études, quel que soit le milieu de pratique : des soins infirmiers en milieu rural aux soins intensifs en milieu urbain.

Quelle est votre première réaction quand vous pensez à un étudiant ou une étudiante en sciences infirmières en stage dans votre service? Évitez-vous de travailler avec cette relève, ou saisissez-vous l’occasion de former le personnel infirmier de demain?

Le Code de déontologie des infirmières et infirmiers autorisés de l’Association des infirmières et infirmiers du Canada (AIIC, 2007) comporte une annexe où il est question des considérations déontologiques concernant les relations avec les étudiants et étudiantes en sciences infirmières, avec deux énoncés qui définissent clairement les interactions entre le personnel infirmier et les étudiants :

Les infirmières et infirmiers se traitent avec respect et respectent également les étudiant(e)s et les autres fournisseurs de soins de santé tout en reconnaissant les différences de pouvoir entre les dirigeants officiels, les collègues et les étudiant(e)s. Ils collaborent afin d’honorer la dignité et de résoudre les conflits d’opinion de façon constructive.(p. 46)

Les infirmières et infirmiers partagent leurs connaissances, fournissent une rétroaction, font du mentorat et donnent des conseils pour favoriser le perfectionnement professionnel des étudiant(e)s en sciences infirmières, des infirmières et infirmiers novices, des autres membres du personnel infirmier et des autres fournisseurs de soins de santé. (p. 46)

C’est assez clair : aider les étudiantes et étudiants en sciences infirmières est notre responsabilité déontologique à tous.

Les organismes de réglementation provinciaux fixent les normes de pratique pour la profession. Ces énoncés généraux fondés sur les principes expliquent aussi ce qui est attendu du personnel infirmier autorisé dans tous les milieux de pratique pour ce qui est de soutenir les étudiants en sciences infirmières. En Saskatchewan, où j’exerce en soins directs comme infirmière autorisée, les normes de la Saskatchewan Registered Nurses Association, Registered Nurse Practice Standards (SRNA, 2019), stipulent :

Norme 4 : Service au public
L’infirmière ou infirmier autorisé fait montre de leadership dans sa pratique infirmière de qualité et conforme à l’éthique, dans sa prestation de soins de santé et dans ses relations professionnelles. L’infirmière ou infirmier autorisé respecte cette norme en : […] 48. Intervenant comme mentor formel ou informel pour des infirmières et infirmiers autorisés, des étudiants ou étudiantes en sciences infirmières et des collègues et en appuyant le développement professionnel. [TRADUCTION]

… aider les étudiants en sciences infirmières est notre responsabilité déontologique à tous.

Vous aurez compris que je prends au sérieux ma responsabilité d’appuyer le développement professionnel des étudiants et étudiantes en sciences infirmières.

Mon expérience de préceptrice

Pendant mes 31 années de pratique clinique, j’ai progressé sur le plan professionnel et acquis des compétences comme préceptrice pour des étudiants et étudiantes en science infirmières. Ces cinq dernières années, dans un établissement de soins complets en milieu rural, j’ai rempli tous les ans le rôle de préceptrice pour des étudiants de 4e année. J’ai la conviction que chaque membre du personnel infirmier a quelque chose à offrir aux étudiants.

Quand ma fille suivait le programme de baccalauréat en sciences infirmières en collaboration offert par Saskatchewan Polytechnic et l’Université de Regina, j’en ai profité pour assister à une séance d’apprentissage offert par son programme aux infirmières et infirmiers autorisés qui songeaient à intervenir comme précepteurs auprès d’étudiants et étudiantes en sciences infirmières. J’ai retiré de cette séance des enseignements précieux qui m’ont rassurée sur mes capacités de préceptrice auprès d’un étudiant ou d’une étudiante en sciences infirmières qui me suivrait pendant six semaines. Il n’y avait aucun enseignant clinique sur place, mais on pouvait les joindre par téléphone ou par courriel.

Si chaque étudiant a une personnalité, un style d’apprentissage, une expérience antérieure et des objectifs propres, tous partagent de nombreuses caractéristiques. Ils sont tous un peu (voire très) nerveux au début. Ils s’adaptent tous à un milieu de travail totalement nouveau, avec de nouveaux visages et un précepteur au lieu d’un instructeur clinique. Et ils veulent tous mettre en pratique ce qu’ils ont appris.

Il est utile, ai-je découvert, de rencontrer les étudiants avant même qu’ils ne mettent le pied dans l’établissement. En les retrouvant pour un café un jour ou deux plus tôt, je peux leur donner un aperçu de ce qui les attend le premier jour, répondre à leurs questions et connaître leur plan d’apprentissage. Je leur expose aussi mes attentes à l’avance pour éviter des problèmes par la suite. La ponctualité compte beaucoup pour moi. Autrement dit, il faut arriver 10 minutes avant l’heure convenue; une minute avant ne suffit pas.

Bien avant cette première rencontre, j’ai déjà donné mon horaire aux étudiants pour qu’ils puissent planifier leurs six semaines longtemps à l’avance. Presque aucun des étudiants que je vois n’est de la région, un milieu rural; la plupart ont trouvé un hébergement temporaire pour leur stage, et ils veulent savoir quels jours s’organiser pour rentrer chez eux.

Beaucoup d’infirmières et d’infirmiers présument qu’ils ne peuvent pas intervenir comme précepteurs s’ils travaillent à temps partiel. L’expérience m’a enseigné que faire équipe à deux infirmières ou infirmiers à temps partiel fonctionne à merveille. Les étudiants ont ainsi un peu de souplesse, puisqu’ils peuvent choisir dans l’emploi du temps des deux précepteurs les quarts de travail qui leur conviennent le mieux. Ils gagnent aussi à apprendre auprès de deux mentors plutôt que d’un seul.

Défis et possibilités

Tout comme les étudiants sont différents entre eux, tous les membres du personnel infirmier sont différents dans leur façon d’organiser leur charge de travail, dans leur style, leurs perspectives, leur expérience et leurs points de vue. Il en résulte une expérience très riche pour les étudiants.

Souvent, ces stages de fin d’études sont, pour les étudiants de 4e année, une première expérience du quart de nuit, avec les défis qu’il comporte. J’ai remarqué que les étudiants et étudiantes en sciences infirmières manifestent beaucoup d’intérêt pour les façons dont les habitués du travail de nuit rendent ce quart gérable et prennent soin d’eux-mêmes. Je donne donc à mes étudiants la possibilité de faire des quarts de nuit avec une ou un de mes collègues pour leur donner une autre perspective.

… les étudiants et étudiantes en sciences infirmières manifestent beaucoup d’intérêt pour les façons dont les habitués du quart de nuit … prennent soin d’eux-mêmes …

En plus du travail de soins infirmiers et de ce que nous faisons pour nos patients, il y a d’autres occasions d’apprentissage auxquelles nous ne pensons pas toujours quand nous avons à nos côtés des étudiants en sciences infirmières : j’ai plongé mes étudiants dans mon propre développement professionnel. Ainsi, une étudiante m’a accompagnée à la journée de formation en vue du renouvellement de ma certification en soins avancés en réanimation cardio-respiratoire, et elle m’a vue dans le rôle d’une étudiante évaluée sur un scénario de mégacode.

Un autre étudiant a assisté avec moi à une rencontre du conseil d’administration de mon organisme de réglementation provincial. Il m’a regardée animer la réunion dans ma capacité de présidente.

Tous les étudiants qui ont passé du temps avec moi ont appris comment je m’acquitte des formalités de maintien de la compétence exigées par l’organisme de réglementation pour notre permis d’exercer annuel. Je leur montre aussi les modules de formation en ligne proposés par l’employeur pour nous soutenir dans notre pratique. J’ai utilisé le module en ligne sur les pratiques exemplaires pour la prise en charge transfusionnelle proposé par l’employeur pour rafraîchir les connaissances des étudiants avant de leur demander leur aide pour une transfusion sanguine ou une administration d’immunoglobuline intraveineuse. Cela leur donne plus confiance en eux et instille en eux l’appréciation de l’apprentissage à vie.

Il est extrêmement important, dans ma pratique, que les étudiants se présentent clairement à nos patients et à nos collègues comme des étudiants en sciences infirmières et que nous obtenions la permission des patients pour qu’ils participent à leurs soins. Un avantage de cette pratique pour la préceptrice que je suis est que je peux ensuite discuter avec les patients de leur expérience et recueillir des commentaires utiles sur mes étudiants, de vive voix ou par écrit, pour l’évaluation finale que je remets aux étudiants et aux enseignants cliniques.

Des patients m’ont dit qu’ils trouvaient utiles toutes les explications que je fournis aux étudiants pendant qu’ils effectuent un acte médical et qu’elles les aidaient à mieux comprendre ce que nous faisons. J’ai aussi eu des commentaires de patients sur la posture d’un étudiant, son langage corporel ou son ton, qui ont été très utiles pour aider cet étudiant à s’améliorer. Je recueille de plus l’avis d’autres employés, en particulier les aides aux soins spéciaux et les infirmières et infirmiers auxiliaires autorisés qui travaillent à nos côtés, les autres infirmières et infirmiers autorisés et les médecins avec qui nous interagissons au quotidien.

Rétroaction des étudiants

Un élément central à l’apprentissage de chaque étudiant ou étudiante en sciences infirmières est qu’à la fin de chaque quart, je leur demande de cerner pour moi, informellement, trois choses qu’ils ont apprises ce jour-là. C’est comme ça que nous finissons nos quarts ensemble.

Le premier jour, ça peut être aussi simple que l’endroit où se trouve le réfrigérateur du personnel où ils peuvent mettre leur repas ou bien le nom de trois collègues. Quand le stage avance, l’esprit des étudiants semble s’épanouir. Une étudiante a effectué une évaluation neurologique complète sur un patient à risque imminent d’accident vasculaire cérébral pour son transfert en soins tertiaires. L’étudiante a appris l’utilité de mener une évaluation détaillée et de la documenter soigneusement. Un autre étudiant a appris l’importance des mots employés pour aborder avec les patients et leur famille les sujets délicats de la mort et de la fin de vie.

L’une des plus grandes difficultés … est de savoir quand cesser de surveiller les étudiants et de vérifier leur moindre geste pour leur donner plutôt l’indépendance et les responsabilités nécessaires…

Souvent, les étudiants ne mentionnent pas la communication et la collaboration interprofessionnelles dans leur plan d’apprentissage. Ils mettent généralement l’accent sur des tâches précises comme l’insertion d’un cathéter IV ou le sondage vésical. Mon rôle comme préceptrice est d’augmenter leur apprentissage lorsque des occasions se présentent.

Visites aux patients

Nous avions une médecin suppléante qui assurait les soins les week-ends. J’avais déjà constaté que cette personne faisait la tournée complète des patients le samedi matin. Le vendredi après-midi, j’ai donc suggéré à mon étudiante d’accompagner la médecin le lendemain, une excellente occasion d’élargir sa zone de confort.

L’étudiante et moi avons préparé cette tournée en nous assurant qu’elle connaissait tous les patients et leurs antécédents. Nous avons parlé des outils de communication qu’elle utiliserait pour présenter le dossier des patients et pour les faire participer, ainsi que leur famille, à la visite. L’étudiante devait également discuter des problèmes des patients avec l’infirmière ou l’infirmier qui s’occupait d’eux ce jour-là.

Le samedi matin, mon rôle consistait à expliquer à la médecin suppléante ce que nous avions planifié et à lui demander sa collaboration à l’apprentissage de l’étudiante. En fin de compte, ce que l’étudiante pensait être sa tâche la plus difficile s’est avéré un exercice de leadership et de communication enrichissant, l’une des trois choses les plus utiles qu’elle a apprises pendant tout son stage, selon elle.

Indépendance et responsabilité

L’une des plus grandes difficultés que rencontre un précepteur dans le cadre d’un stage de six semaines est de choisir le moment où cesser de surveiller les étudiants et de vérifier leur moindre geste, pour leur donner plutôt l’indépendance et les responsabilités nécessaires à leur transition d’étudiants à infirmières et infirmiers novices. J’ai constaté que certains étudiants sont prêts, mais pensent qu’ils ne le sont pas : ils ont besoin qu’on les pousse doucement ou qu’on leur donne des défis pour prendre confiance en eux. D’autres prennent l’initiative et se déclarent prêts à voler de leurs propres ailes. Quelle que soit la situation, il est important que les précepteurs et les étudiants communiquent bien pour s’assurer que la sécurité des patients passe avant tout le reste.

Être la préceptrice d’étudiants dans un hôpital rural de 12 lits, leur offrir des expériences très riches et variées qui ne sont possibles qu’en milieu rural, dans une équipe de soins de santé soudée où les intervenants se connaissent et s’entendent bien, c’est un privilège. Quand ces étudiantes et étudiants en sciences infirmières vous disent qu’ils envisagent de faire acte de candidature pour un poste dans votre équipe et que, quelques semaines plus tard, ils vous appellent pour vous dire qu’ils ont réussi leur NCLEX-RN, c’est une grande fierté.

Et quand, plus tard, vous devenez collègues et travaillez ensemble, c’est encore mieux!

Références

Association des infirmières et infirmiers du Canada, Code de déontologie des infirmières et infirmiers autorisés, 2017.

Saskatchewan Registered Nurses Association. Registered nurse practice standards, 2019.


Joanne Petersen est diplômée en sciences infirmières du Kelsey Institute of Applied Arts & Science à Saskatoon, en Saskatchewan, promotion de 1989. Elle est fière de travailler en soins directs à l’hôpital Assiniboia Union dans le Sud de la Saskatchewan. Le professionnalisme en soins infirmiers et le leadership exercé à partir des fonctions que l’on occupe, quelles qu’elles soient, la passionnent.

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