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Partout où elle va, Sopari Sor sait créer une communauté

  
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oct. 01, 2016, Par: Kate Heartfield

Partout où elle va, Sopari Sor sait créer une communauté

Sopari Sor
Teckles Photography Inc.

Sopari Sor ne se souvient pas du camp de réfugiés où elle est née, à la frontière entre le Cambodge et la Thaïlande. La jeune femme de 23 ans vient de devenir infirmière autorisée, avec en poche un diplôme de l’Université Trinity Western (UTW) à Langley (C.-B.). Elle retournera un jour dans son Cambodge natal, affirme-t-elle, pour aider ceux qui se sentent aussi déconnectés et seuls qu’elle l’a été.

Après le génocide perpétré par les Khmers rouges, puis l’invasion vietnamienne, beaucoup de Cambodgiens ont dû fuir pour survivre, dont la famille de Mme Sor. Lorsqu’elle avait un an, les camps de réfugiés ont fermé. Son père a quitté la famille deux années plus tard, et sa mère est partie chercher du travail, les confiant, elle et son frère, à leur grand-mère, dans un village isolé.

Ils n’avaient que du riz pour se nourrir. Mme Sor voulait quitter l’école pour passer plus de temps à vendre des gâteaux de riz dans la rue et gagner plus d’argent, mais sa grand-mère a insisté pour qu’elle reçoive une éducation décente.

Par conséquent, Mme Sor a dû quitter leur village. À huit ans, elle a été envoyée à Phnom Penh, où elle a passé le reste de son enfance avec une tante et d’autres parents qu’elle n’avait jamais vus auparavant. Elle a trouvé ce déracinement très difficile.

« Je suis devenue un peu déprimée, je crois. J’étais assaillie par la tristesse. Je ne savais pas comment gérer cette émotion, alors je suis devenue silencieuse, se souvient-elle. »

Cette expérience lui a été utile, bien plus tard, pour établir des relations thérapeutiques dans un foyer pour femmes ayant des problèmes de toxicomanie et de santé mentale, où elle a fait un stage clinique dans la communauté. « Je voyais bien que ce qui arrive à une personne n’est pas le résultat d’événements récents, mais est plutôt enraciné dans son histoire – comment elle est née, comment elle a été élevée et comment elle digère tout ce qui lui arrive et s’adapte. »

Adolescente, elle a étudié en anglais à la Logos International School. L’été, elle offrait ses services comme coordinatrice et interprète pour des équipes médicales internationales en visite. Inspirée par leurs efforts pour améliorer l’accès aux soins de santé dans diverses régions du pays, elle a commencé à envisager une carrière dans les soins de santé.

Certains de ses enseignants, qui entretenaient des liens avec l’UTW, l’ont encouragée à demander une bourse pour étudiants étrangers extrêmement défavorisés. Sa demande a été acceptée, et elle est arrivée au Canada en 2011 pour étudier à l’UTW. Elle a été admise au programme de sciences infirmières en 2012.

Mme Sor a financé ses études avec des bourses et des emplois à temps partiel, travaillant entre autres comme peintre, infirmière étudiante à l’hôpital Memorial de Langley et assistante de laboratoire à l’école de sciences infirmières.

Toutefois, elle trouvait plus difficile d’expliquer ce qu’elle avait vécu à des Canadiens qui ne savaient rien du Cambodge et de ne pas avoir les repères nécessaires, en matière de culture populaire, pour tisser des liens avec ses pairs. C’était un autre gros ajustement, et le mal du pays et un sentiment de déconnexion sont réapparus. En plus, ajoute-t-elle, « essayer de comprendre la culture infirmière était vraiment difficile, car la profession a une culture, un langage et des exigences professionnels qui lui sont propres. »

Mme Sor a trouvé particulièrement douloureux de ne pas pouvoir retourner au Cambodge quand sa grand-mère est morte en 2012. Un an plus tard, alors qu’elle faisait un stage clinique dans une résidence pour personnes âgées, elle a trouvé des façons de rendre hommage à cette femme qui a tant compté pour elle. Elle a écouté les résidents raconter leur passé et, en retour, leur a parlé de sa grand-mère. Issue d’une culture où des membres de la famille s’occupent des personnes âgées, Mme Sor dit avoir éprouvé beaucoup de sympathie pour les patients qui avaient peu de contacts avec leur famille.

Progressivement, le Canada a commencé à devenir son pays – ou au moins l’un de ses pays. L’UTW, souligne Mme Sor, était l’endroit parfait pour faire ses études infirmières. Le campus étant petit, il lui a été plus facile de faire connaissance avec des gens, et elle savait qu’elle pouvait compter sur ses professeurs si elle avait besoin d’aide. Rapidement, c’est elle qui a aidé d’autres étudiants à s’adapter à la vie au Canada, en collaborant au programme pour étudiants étrangers sur le campus.

Mme Sor compte devenir citoyenne canadienne. Pour l’instant, elle a un permis de séjour pour trois ans et espère trouver du travail à l’hôpital d’Abbotsford, de préférence dans l’unité de médecine ou de chirurgie. Son objectif est de devenir infirmière praticienne, et elle sait qu’il lui faudra d’abord acquérir tout un éventail de compétences.

À la fin des trois ans, elle et son mari, un Canadien, veulent passer du temps au Cambodge. « À nous deux – il est enseignant – nous pourrions beaucoup apporter au Cambodge, sur le plan de l’éducation et des soins infirmiers. »

L’une des choses qu’elle veut y faire, déclare-t-elle, est soutenir les femmes qui ont fait l’objet de trafic sexuel. Elle a rencontré des femmes qui travaillaient dans le quartier des prostituées à Phnom Penh, et elle sait combien l’accès à des soins de santé est restreint pour les Cambodgiens pauvres et vulnérables.

« J’ai le sentiment d’avoir eu une chance et un privilège extraordinaires en ayant la possibilité de mener des études supérieures, conclut Mme Sor. Je veux maintenant faire ma part. »

10 questions à Sopari Sor

Si vous deviez choisir un mot pour vous décrire, ce serait lequel?
Résiliente

Si vous pouviez changer une chose en vous, qu’est-ce que vous changeriez?
J’aimerais avoir une meilleure voix pour chanter.

Parmi ce que vous avez accompli, quelle est votre plus grande fierté?
Avoir obtenu mon diplôme de sciences infirmières

Quelle est l’une des choses que les gens seraient surpris d’apprendre à votre sujet?
Je savais lire le sanskrit khmer quand j’avais six ans.

« Si j’avais plus de temps libre, je ... »
J’apprendrais une autre langue.

Où avez-vous passé vos dernières vacances?
À New York

Quel est l’endroit du monde que vous aimeriez le plus visiter?
Rome ou Paris (je n’arrive pas à choisir, sans doute les deux)

Quel est le dernier livre que vous avez lu et aimé?
Le Petit Prince d’Antoine de Saint-Exupéry, pour la troisième fois

Quel est le meilleur conseil que vous ayez reçu pour votre carrière?
Apprends de tout le monde.

S’il était en votre pouvoir de changer une chose dans le système de soins de santé, qu’est-ce que vous changeriez?
Les gestionnaires devraient davantage recueillir l’avis du personnel infirmier avant d’apporter des changements dans les services.


Kate Heartfield est journaliste indépendante à Ottawa.

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