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Main dans la main sur le chemin de la réconciliation

  
https://www.canadian-nurse.com/blogs/cn-content/2016/05/07/walking-side-by-side-on-a-journey-of-reconciliatio

D’initiative étudiante, une Journée du chandail orange encourage les participants à contribuer et réfléchir à la justice sociale et à l’équité en matière de santé

May 07, 2016, Par: Donna Martin, inf. aut., Ph.D. , Elaine Mordoch, inf. aut., Ph.D. , Kendra Rieger, inf. aut., B.Sc.inf.
Group of participants wearing Every Child Matters t-shirts
Lai Chun Yee, école de sciences infirmières de l’Université du Manitoba.

Au Manitoba, en 2011, 14 % de la population se déclaraient d’ascendance autochtone (Statistique Canada, 2013). Étant donnée la complexité des déterminants de la santé, chez les Autochtones, il est essentiel que le personnel infirmier et la relève comprennent le legs du colonialisme, y compris les pensionnats et leur impact sur la santé des peuples autochtones. En ignorant les effets néfastes multigénérationnels, tant potentiels que réels, des pensionnats sur la santé, on freine la guérison et la réconciliation et on perpétue les politiques et les pratiques oppressives en matière de soins de santé (Commission de vérité et réconciliation du Canada, 2015).

Pour promouvoir une meilleure compréhension, l’Association des étudiant(e)s infirmier(ère)s du Canada et son équivalent à l’Université du Manitoba (NSA) se sont officiellement engagés en 2014 à reconnaître ce qui s’est passé dans les pensionnats et l’incidence du colonialisme sur la santé et la situation sociale des peuples autochtones. Les deux associations se sont aussi engagées à promouvoir des soins infirmiers respectueux de la culture, maintenant et à l’avenir. La même année, l’école de sciences infirmières de l’Université du Manitoba a accueilli l’exposition de la Fondation autochtone de l’espoir, intitulée « Nous étions si loin : l’expérience des Inuits dans les pensionnats », qui présentait des images et des souvenirs aussi poignants qu’éloquents.

Souhaitant donner suite aux discussions et à l’intérêt suscités par l’exposition, quatre membres de la NSA ont décidé d’organiser des activités sur le campus pendant la Journée du chandail orange (30 septembre) afin de poursuivre la sensibilisation au legs des pensionnats. La Journée du chandail orange, reconnue dans tout le Canada, est née du récit de Phyllis (Jack) Webstad de la confiscation de son chandail orange tout neuf lors de son premier jour au pensionnat de William’s Lake (C.-B.) (Indian Residential School Survivors Society, sans date). Devenu un symbole national, le chandail orangé rend désormais hommage aux survivants des pensionnats et à leur famille. Les quatre étudiantes ont également adopté l’idée d’autres groupes et organisations pour marquer cette journée : une marche de sensibilisation.

Les étudiantes et les auteures du présent article (deux professeures et une doctorante de la faculté de sciences infirmières) ont réfléchi à une proposition de financement d’une marche organisée par des étudiants. Le groupe a demandé les conseils de l’aînée-résidente au Centre for Aboriginal Health Education pour veiller à ce que cette manifestation respecte la culture autochtone et soit significative.

Mise en œuvre

L’aînée-résidente a guidé les étudiantes dans leur demande de financement et dans la planification et l’organisation de la marche. Une fois obtenu le soutien du fonds de dotation des sciences infirmières, le comité de planification s’est réuni régulièrement pendant cinq mois pour préparer un plan détaillé. La doyenne de la Faculté des sciences infirmières et le président de l’université ont immédiatement accordé leur soutien. Les étudiantes ont commencé à recruter des bénévoles parmi les étudiants pour leur prêter main-forte.

Par l’entremise des médias sociaux, d’affiches, de kiosques d’information et du bouche-à-oreille, le comité de planification a, durant la semaine d’orientation, invité les autres étudiants et professeurs en sciences infirmières, les survivants et leur famille à participer à la marche. Les personnes souhaitant participer recevraient un chandail orange arborant le slogan « Every Child Matters » (Chaque enfant compte) et une tortue (symbole de la vérité), conçu par une artiste autochtone de la région. Une tente où les participants pourraient se réunir après la marche serait dressée sur le campus.

L’aînée-résidente ayant indiqué que des survivants ou des membres de leur famille pourraient être perturbés pendant ces activités, une salle privée a été prévue pour que des conseillers autochtones puissent s’y tenir à leur disposition pour en parler et les soutenir.

La participation des médias étant essentielle pour sensibiliser le public à cette manifestation, la représentante autochtone de la NSA s’est proposée pour des entrevues. Les autres membres du comité ont organisé des simulations pour la préparer.

Le 30 septembre 2015, après une prière d’ouverture récitée par l’aînée-résidente, une chanteuse avec un tambour de cérémonie a mené la procession de plus de 150 personnes. La marche a suivi un parcours défini à l’avance le long des chemins piétons du campus, avec des arrêts à des endroits significatifs, dont le Centre national pour la vérité et réconciliation, où une représentante a officiellement accepté un engagement signé et encadré des étudiants de la NSA.

Au terme de la marche, les participants se sont rassemblés à la tente dressée près du Helen Glass Centre for Nursing. Dans leur discours, le président de l’université et la doyenne de la faculté des sciences infirmières ont félicité les étudiantes pour leur initiative et rendu hommage aux survivants et à leur famille. Conformément aux traditions autochtones, un festin a été offert aux participants, qui l’ont beaucoup apprécié.

Puis, les organisatrices ont distribué des marqueurs de couleur aux participants et les ont invités à s’exprimer sur ces événements et sur ce qu’ils avaient retiré de l’activité en dessinant des graffitis sur des murs prévus à cet effet dans le centre Helen Glass. Des questions visant à susciter la réflexion étaient affichées. Deux artistes autochtones, elles-mêmes survivantes des pensionnats, ont illustré leur expérience. Tout au long de la journée, survivants et parents ont discuté librement avec des étudiantes, étudiants et professeurs de la faculté de sciences infirmières, racontant leurs expériences à l’aide des souvenirs qu’ils avaient conservés. Certains des survivants ont choisi la pièce privée pour y confier leur témoignage à une étudiante ou un étudiant en tête-à-tête.

Résultats et enseignements retenus

Les survivants et les membres de leur famille ont rencontré les étudiants et les professeurs dans un esprit de réconciliation. Leurs témoignages et graffitis témoignent de l’impact profond qu’ont laissé sur les étudiantes et les étudiants les récits de leurs compagnons de marche. Ils ont été sidérés par la force et la résilience des survivants.

Immédiatement après la marche, le comité de planification s’est réuni pour faire le bilan et parler de ses interprétations des activités. Les membres du comité étaient extrêmement satisfaits du résultat, et les enseignants en ont félicité les membres d’avoir organisé une rencontre aussi fructueuse et respectueuse.

Nous avons réalisé une analyse thématique des dessins et des textes laissés sur les murs et y avons trouvé des indications d’un apprentissage profondément transformateur.

Les étudiantes et les étudiants ont pu constater la force et la beauté de l’apprentissage par l’expérience, de la pédagogie par l’art et de l’engagement communautaire, et ils ont découvert combien le mentorat peut favoriser l’éducation permanente.

Tous les membres du comité de planification ont appris l’importance de communiquer clairement et efficacement et de recruter suffisamment de bénévoles pour tout ce qu’il y a à faire. Si l’on craignait au début que certains des graffitis soient déplacés, ce ne fut pas le cas. Et il était judicieux d’avoir prévu une pièce privée où amorcer et poursuivre certaines conversations.

L’accès aux conseils de l’aînée tout au long du projet a grandement contribué à la réussite de la marche. D’autre part, la participation de la communauté des survivants et de leur famille en a décuplé le sens.

Nous prévoyons organiser la marche de sensibilisation tous les ans pour sensibiliser les cohortes futures d’étudiantes et étudiants en sciences infirmières au legs du colonialisme et pour leur permettre de voir comment rendre respectueusement hommage aux survivants des pensionnats. Nous espérons que d’autres groupes d’étudiantes et étudiants en sciences infirmières au Canada seront incités à organiser des manifestations et à signer des engagements similaires. Rendre hommage aux survivants et à leur famille et reconnaître que le passé du Canada continue d’influencer la santé des Autochtones est un premier pas important sur le chemin de la réconciliation.

Remerciements

Les auteures remercient les quatre membres de la NSA : Maria Cortes-Toro, Hannah Curtis, Heather Waloschuk et Jessica Loeppky. Elles souhaitent exprimer leur gratitude aux artistes Nadine McDougall, Elaine McIntosh et Justina McKay, à Margaret Lavallee, aînée-résidente, et à Amanda Penzick, du Centre for Aboriginal Health Education, pour leurs contributions. Elles remercient enfin le fonds de dotation pour les sciences infirmières de son appui.

Références

Commission de vérité et réconciliation du Canada. Honorer la vérité, réconcilier pour l’avenir – Sommaire du rapport final de la Commission de vérité et réconciliation du Canada, 2015.

Indian Residential School Survivors Society. (sans date) Orange Shirt Day.

Statistique Canada. Les peuples autochtones au Canada : Premières nations, Métis et Inuits – Enquête nationale auprès des ménages, 2011, 2013.


Donna Martin, inf. aut., Ph.D., est professeure adjointe à la faculté de sciences infirmières de l’Université du Manitoba. Ses recherches portent sur la santé des peuples autochtones, la justice sociale et l’équité en matière de santé. 
Elaine Mordoch, inf. aut., Ph.D., est professeure adjointe à la faculté de sciences infirmières de l’Université du Manitoba. Elle s’intéresse, dans ses cours et ses recherches, aux soins infirmiers en santé mentale, à la diversité culturelle et à la santé mentale des familles. 
Kendra Rieger, inf. aut., B.Sc.inf., est doctorante à la faculté de sciences infirmières de l’Université du Manitoba. Elle a obtenu une Bourse d’études supérieures du Canada Frederick Banting et Charles Best des Instituts de recherche en santé du Canada. Ses recherches portent sur la pédagogie par l’art.
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