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Faire son travail, tout simplement

  
https://www.canadian-nurse.com/blogs/cn-content/2015/10/01/getting-the-job-done

Cinq décennies de soins infirmiers n’ont en rien altéré l’engagement de Marilyn Sark pour la santé et le bien-être des collectivités de toutes tailles

oct. 01, 2015, Par: Leah Geller
Marilyn Sark
Teckles Photography Inc.

En 1972, un pont a été construit entre l’île Lennox et la côte nord-ouest de l’Île-du-Prince-Édouard. Avant, un bateau de pêche faisait office de traversier public pour ses quelques centaines de résidents micmacs. L’hiver, se souvient Marilyn Sark, il fallait traverser la glace à pied, à cheval et en traîneau ou en motoneige.

Mme Sark a grandi sur l’île Lennox. « Comme nous étions à presque un mille de la côte, les gens ne se rendaient chez le docteur que lorsqu’ils étaient vraiment malades. Il s’agissait exclusivement de soins actifs, pas de prévention. Beaucoup de femmes devaient accoucher à la maison. Il n’y avait pas de services de santé sur l’île. »

Mme Sark a obtenu son baccalauréat en sciences infirmières en 1963 à l’Université Mount Saint Vincent, tout en faisant sa formation à l’école de sciences infirmières d’Halifax. Sur l’île Lennox, elle a été la première à obtenir un diplôme universitaire, et la première femme autochtone de l’Î.-P.-E. à être diplômée en sciences infirmières. « Pour être honnête, si je suis allée à l’université, c’est parce qu’on me trouvait trop jeune pour exercer comme infirmière à la fin du secondaire. Je n’étais pas convaincue au début, mais le diplôme m’a été utile! »

Au départ, Mme Sark a accepté des postes de formatrice clinique en soins infirmiers psychiatriques et chirurgicaux dans des hôpitaux de Charlottetown. Plus tard, devenue maman, elle a bifurqué vers les soins infirmiers généraux et les quarts occasionnels.

Pendant la construction du pont, Mme Sark est revenue sur l’île Lennox avec son mari et leurs quatre garçons. Elle voulait que les membres de sa communauté accèdent aux soins de santé dont ils avaient besoin. « J’ai contacté le chef du Conseil, et nous avons obtenu de Santé Canada un financement pour permettre au Conseil de bande d’embaucher une infirmière locale à temps partiel. »

C’est sa candidature qui a été retenue, ce qui n’était guère surprenant, et elle a ouvert sa pratique dans deux pièces situées au rez-de-chaussée d’un petit immeuble à logements près du magasin général. « Mes journées étaient variées : on m’appelait tant pour une toiture qui coulait que pour soigner un orteil cassé, raconte Mme Sark en riant. J’étais de garde jour et nuit, sept jours sur sept parce que j’étais aussi l’agente du bien-être social à mi-temps. »

Mme Sark a contacté les organismes de services sociaux de la province ainsi que des experts en toxicomanie, des infirmières et infirmiers en santé publique et d’autres professionnels de la santé pour mettre en place des services de santé continus, et leur réaction a été enthousiaste. Elle était lancée. Ses objectifs : la prévention et la promotion de la santé. Au tout début, elle a créé un programme d’immunisation, offert des cours et des soins prénatals et mis en place des cours sur le rôle parental. Elle a organisé des réunions des Alcooliques anonymes et fixé des rendez-vous chez le dentiste. Quand ses patients n’avaient pas de voiture, elle coordonnait leur transport.

Autre première qui a marqué sa carrière bien remplie : elle a établi un conseil de santé communautaire, avec des représentants de la jeunesse, des hommes, des mères et des personnes âgées. Ce type de structure n’existait pas dans les autres communautés autochtones. « Au début, je travaillais seule et je voulais entendre les préoccupations des autres, avoir leur avis sur mes idées, explique Mme Sark. Maintenant, je fais remarquer aux gens qui font partie d’équipes de santé qu’ils ont de la chance de pouvoir discuter les uns avec les autres. »

Dans les années 1980, le financement a permis qu’elle devienne infirmière en santé communautaire à temps complet, fonctions qu’elle a occupées jusqu’en 1992. Un centre a été construit spécialement pour les soins de santé au milieu des années 1990. Ce fut formidable pour l’île Lennox, souligne Mme Sark. L’équipe interdisciplinaire de soins comporte aussi, à l’heure actuelle, une infirmière de soins à domicile, une agente de santé communautaire, des intervenants en soutien familial et en toxicomanie et des professionnels des soins de santé itinérants.

Pendant les 20 années suivantes, elle a réorienté ses activités de mobilisation pour agir à titre de coordinatrice de la formation en santé pour la Première nation de l’île Lennox et de présidente de l’Aboriginal Nurses Association of Canada et de l’Aboriginal Women’s Association of PEI (AWAPEI). Aujourd’hui, à 73 ans, elle continue de travailler pour la province comme infirmière occasionnelle dans les services de consultation externe en toxicomanie.

Sa participation au sein d’organisations locales, régionales, provinciales et nationales est source de fierté et d’inspiration. En 2003, avec d’autres membres de l’AWAPEI, elle a obtenu des fonds pour un projet de sensibilisation à l’ensemble des troubles causés par l’alcoolisation fœtale. « Nous avons commencé par sensibiliser les professionnels des soins de santé, les enseignants, les agents de probation et les avocats en leur montrant que ce problème concernait tout le monde à l’Î.P.-E. »

Avec le temps, la mission du projet s’est élargie : « Nous nous penchons sur ce dont tous les enfants ont besoin pour être en sécurité et heureux. » En tant que coordinatrice du projet et animatrice des équipes de développement de l’enfant pour la Première nation de l’île Lennox et celle, voisine, d’Abegweit, Mme Sark dirige des ateliers pour des professionnels qui travaillent auprès des enfants et des parents.

L’œuvre de Mme Sark a été reconnue à maintes reprises au fil des ans. Elle a entre autres reçu la Médaille du jubilé de la Reine Elizabeth II et le titre de citoyenne de l’année de l’île Lennox. En octobre, elle acceptera le titre de citoyenne âgée de l’année de l’Île-du-Prince-Édouard. Quand on lui parle de ces honneurs, Mme Sark se contente de répondre « On fait son travail, tout simplement, ce qu’il y a à faire. »

10 questions à Marilyn Sark

Quel mot vous décrit le mieux?
Déterminée

Si vous pouviez changer une seule chose vous concernant, qu’est-ce que ce serait?
J’aimerais être plus à l’aise quand je dois parler en public

De tout ce que vous avez accompli, de quoi êtes-vous la plus fière?
D’avoir apporté des services de santé sur l’île Lennox et d’y avoir été la première infirmière de santé publique

Quelle est la chose que les gens seraient le plus surpris d’apprendre à votre sujet?
Combien je suis timide, en réalité

Où avez-vous passé vos dernières vacances?
À Disney World à Orlando, en famille

Quel est l’endroit du monde que vous aimeriez le plus visiter?
Hawaï

Quel est le dernier livre captivant que vous avez lu?
Bouillon de poulet pour l’âme des infirmières de Jack Canfield, Mark Victor Hansen, Nancy Mitchell-Autio et LeAnn Thieman

Qui vous a donné envie d’être infirmière?
Une religieuse qui était infirmière dans notre communauté et les infirmières qui m’ont soignée à l’hôpital quand j’étais enfant

Quel est le meilleur conseil de carrière qu’on vous ait donné?
D’obtenir un diplôme tant que j’étais encore jeune, en plus de mon permis d’exercer

Si vous aviez le pouvoir de changer un aspect du système de santé, quel serait-il?
J’aimerais voir plus de services de santé mentale et de toxicomanie à l’Î.-P.-É.


Leah Geller est journaliste indépendante (santé et sciences) à Ottawa.

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