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Augmenter la précision du calcul de la perte sanguine estimée

  
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Des infirmières en soins périopératoires et un ingénieur en logiciel conçoivent un programme de calcul de la PSE.

Apr 07, 2018, Par: Heather Wyers, B. Sc. inf., inf. aut., CSP(C) , Joyce Hwang, B. Sc. inf., inf. aut.

En soins périopératoires, la perte sanguine est un aspect inévitable de la plupart des interventions chirurgicales. Il est essentiel de pouvoir la mesurer avec exactitude pour déterminer si une hémorragie est potentiellement mortelle et gérer correctement le remplacement des produits sanguins. La perte sanguine peropératoire est un indicateur majeur pour prédire les résultats des opérations, en particulier le taux de mortalité des patients, qui augmente lorsque les patients reçoivent des transfusions sanguines (Stahl, Groeben, Kroepfl, Gautam et Eikermann, 2012).

Dans le secteur des soins périopératoires de notre hôpital universitaire de soins tertiaires, la pratique utilisée pour mesurer la perte sanguine estimée (PSE) combine des mesures directes et gravimétriques (poids). Dans notre établissement, c’est le personnel infirmier périopératoire qui calcule la PSE, en additionnant les quantités aspirées (volume liquide) au poids des éponges chirurgicales utilisées, puis en soustrayant du total la quantité d’irrigation utilisée. Cette formule tient compte du poids des éponges avant utilisation et de la quantité d’irrigation laissée sur le champ stérile. Ce calcul prend du temps, et les erreurs sont fréquentes. De plus, la rapidité inhérente au milieu opératoire augmente la possibilité d’erreurs.

Chacun des calculs – parfois effectués plusieurs fois pendant une opération – et des résultats est inscrit sur un tableau blanc dans la salle d’opération, et visible pour toute l’équipe chirurgicale. Les résultats sont également communiqués verbalement à l’équipe d’anesthésie. Cette information fait partie intégrante de la décision de faire ou non une transfusion de sang ou de produits sanguins.

Le projet

Lorsque notre équipe a effectué une analyse des causes profondes découlant d’une enquête sur deux événements sentinelles en salle d’opération liés à la perte sanguine, l’un des résidents en anesthésiologie a noté que le temps nécessaire pour calculer la PSE retardait la prise de décisions.

Nous avons décidé de proposer un projet d’amélioration de la qualité qui augmenterait l’exactitude et l’efficacité du calcul. Nous avons reçu un financement accordé par la Fondation Krembil pour les études en sciences infirmières, ce qui nous a permis de nous libérer de nos obligations en salle d’opération pour planifier et réaliser notre projet et concevoir un outil de calcul informatisé. Nous avons eu accès à des mentors pour nous guider dans notre étude et à un soutien financier pour diffuser nos résultats.

Pendant la première phase du projet, nous avons interviewé des infirmières et infirmiers novices et chevronnés en soins périopératoires ainsi que des membres de l’équipe d’anesthésie pour savoir comment la PSE était calculée. Des problèmes ont souvent été évoqués. En plus des entrevues, nous avons observé du début à la fin 30 opérations neurologiques et rachidiennes, en nous servant d’une liste de contrôle que nous avions préparée pour repérer les écarts dans la façon dont le personnel infirmier calcule la PSE. Nous avons aussi noté le temps que leur prenait le calcul.

Nos observations ont révélé que, 49 % du temps, au moins une sorte d’erreur était commise : erreur mathématique, oubli d’une valeur nécessaire au calcul ou utilisation d’un récipient qui n’était pas fait pour mesurer. Le calcul de la PSE prenait en moyenne 146 secondes. La fréquence des erreurs nous a surprises, mais elle a confirmé à nos yeux la nécessité de trouver un meilleur procédé.

Pendant la deuxième phase, nous avons, avec le résident en anesthésiologie, créé la première version de l’outil : un fichier Excel qui calculait automatiquement la PSE une fois entrées toutes les valeurs nécessaires. Cependant, les tests menés auprès du personnel infirmier ont montré qu’il ne trouvait pas la présentation conviviale. Nous avons donc demandé l’aide l’un ingénieur en logiciel, un ami, qui a travaillé bénévolement à la création d’un programme modifié pour guider les infirmières et infirmiers dans le calcul de la PSE.

Des commentaires beaucoup plus positifs ont suivi notre démonstration du programme devant des infirmières et infirmiers en soins périopératoires, menée pendant les heures de service. Avec le soutien de notre gestionnaire, nous avons présenté une demande spéciale à notre département de TI pour qu’il installe le programme sur les ordinateurs de tous les postes de soins infirmiers en salles d’opération. Malgré notre certitude que cet outil aiderait à réduire le nombre d’erreurs, cela nous a pris plus de temps que prévu pour obtenir l’adhésion du département de TI parce que le programme avait été conçu à l’externe.

Une semaine environ après le déploiement complet de l’outil, nous avons à nouveau consulté le personnel infirmier et, en utilisant la même liste de contrôle, nous avons procédé à une nouvelle série d’observations sur 30 autres opérations neurologiques et rachidiennes.

Les commentaires positifs ont confirmé que l’outil est un moyen plus exact et efficace de calculer la PSE. Le pourcentage d’erreurs de calcul était descendu à 22 %, et le temps moyen que prenait le calcul était passé à 109 secondes. Dans l’ensemble, les erreurs avaient diminué de 27 %, et le temps nécessaire pour calculer la perte sanguine s’était raccourci de 25 %.

Malgré cette réussite manifeste, nous avons remarqué que quelques infirmières et infirmiers parmi les plus chevronnées hésitaient à continuer d’utiliser la nouvelle technologie. Pour répondre à leurs inquiétudes au sujet de cette nouvelle façon de procéder, nous leur avons apporté du soutien individuel supplémentaire.

Les résultats du sondage effectué auprès du personnel infirmier en soins périopératoires quelques mois après la mise en œuvre a montré que c’était en neurochirurgie et en chirurgie rachidienne que l’outil était le plus utilisé, ainsi que pour les opérations orthopédiques où il y avait une perte sanguine importante. Pour les opérations où l’on s’attendait à ce que la perte sanguine soit minime, l’outil n’était pas souvent utilisé.

Enseignements tirés

Le processus dans son ensemble, de la conception à la mise en œuvre, a pris plus de deux ans. Nous avons constaté très tôt l’importance et l’utilité des avis du personnel infirmier en soins périopératoires – le principal intéressé – pour guider l’amélioration de l’outil. Avec ses contributions, nous avons pu créer un outil vraiment convivial, avec une capacité et des fonctions que n’avait pas la première version.

Comme l’a montré la deuxième série d’observations, l’utilisation d’un calculateur électronique n’élimine pas les erreurs de calcul de la PSE. Le calculateur ne donc peut pas remplacer l’expérience et le jugement cliniques des infirmières et infirmiers chevronnés en salle d’opération. Ce résultat a néanmoins confirmé ce que nous savions : le personnel débutant doit bien comprendre la formule et les données nécessaires pour arriver rapidement à un résultat exact.

Nous avons eu la bonne fortune de pouvoir diffuser nos résultats au moyen de présentations par affiche et d’exposés dans notre établissement et à des conférences provinciales et nationales consacrées à la pratique infirmière en soins périopératoires.

Deux ans plus tard, nous pouvons rapporter que le calculateur est maintenant utilisé dans plus de services de chirurgie au sein de notre établissement. Nous espérons qu’il sera un jour employé dans les salles d’opération d’autres hôpitaux du Réseau universitaire de santé.

Remerciements

Les auteures remercient la Fondation Krembil pour son soutien et son financement tout au long de ce projet d’amélioration de la qualité.

Référence

Stahl, D. L., Groeben, H., Kroepfl, D., Gautam, S. et Eikermann, M. Development and validation of a novel tool to estimate peri-operative blood loss, Anaesthesia, 67(5), 2012, p. 479-486. doi:10.1111/j.1365-2044.2011.06916.x


Heather Wyers, B. Sc. inf., inf. aut., CSP(C), est infirmière soignante à plein temps en soins périopératoires au sein du Réseau universitaire de santé de Toronto.
Joyce Hwang, B. Sc. inf., inf. aut., est infirmière soignante à plein temps en soins périopératoires au sein du Réseau universitaire de santé de Toronto.

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