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Communiquer avec des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer : les erreurs à éviter

  
https://canadian-nurse.com/blogs/cn-content/2015/06/05/communicating-with-people-with-dementia-avoiding-m
juin 05, 2015, Par: Philippe Voyer, inf. aut., Ph.D.

Q : Je cherche des conseils pratiques à donner aux familles pour communiquer avec des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer ou d’une autre forme de démence.

R : Pour communiquer clairement avec quelqu’un, il faut une bonne mémoire sémantique (pour choisir les bons mots quand on parle) et une bonne mémoire de travail (pour comprendre et interpréter ce que dit l’interlocuteur). Malheureusement, la maladie d’Alzheimer entrave profondément ces deux capacités cognitives. Dans ma pratique clinique, j’observe souvent des tensions entre personnel infirmier et patients âgés atteints de démence. Le problème est souvent que le patient ne participe pas autant que le souhaiterait l’infirmière ou l’infirmier. Il n’écoute pas... Mais il vaudrait mieux dire que le patient ne comprend pas! Voici quelques éléments à garder en tête quand on parle à une personne atteinte de la maladie d’Alzheimer.

Cette maladie fait progressivement perdre aux patients leur vocabulaire; ils ont donc de plus en plus de difficulté à suivre une conversation complexe. C’est pourquoi, pour être compris, il est important de faire des phrases simples et courtes, de parler lentement et clairement, de se limiter à une demande ou à une question à la fois et d’utiliser des indices non verbaux. Il est plus facile pour les patients de comprendre ainsi, ce qui les aidera à coopérer et à participer pendant les soins et les activités.

Évitez les confrontations, car elles augmentent le risque que les patients deviennent plus agités. Par exemple, si un résident d’un centre d’hébergement pense qu’il est l’heure de partir au travail, tenter de l’orienter par rapport à la réalité en lui disant qu’il n’a plus d’emploi ne servira à rien. Mieux vaut lui dire simplement que c’est un jour férié. En fait, en remettant en question sa mémoire, on risque de le rendre plus anxieux et de le plonger dans une situation d’incompréhension qui pourra le faire souffrir et le rendre plus agité (physiquement ou verbalement).

Pour éviter toute escalade, la thérapie par la validation est utile : il s’agit d’entrer dans la réalité de la personne pour comprendre les émotions et les inquiétudes qu’elle exprime. Lorsqu’une patiente de 95 ans cherche sa mère, il est donc plus utile de la laisser parler de sa mère pour que celle-ci devienne réelle dans son esprit que de lui dire qu’elle est morte depuis longtemps, ce qui ne ferait que perturber la patiente et l’attrister.

Il arrive que le personnel infirmier soit mal à l’aise avec la thérapie par la validation, car les cours de psychiatrie enseignaient l’importance de dire la vérité aux patients et de les aider à faire la distinction entre ce qui est réel et ce qui ne l’est pas. Cette stratégie était prisée dans les années 1990, mais les soins ont évolué depuis, et on sait que cette approche n’est pas efficace auprès des aînés atteints d’une démence.

Il faut savoir également que leur maladie ne les empêche pas de souhaiter avoir une conversation. Pourtant, peu de gens prennent le temps de les écouter en raison du manque de logique de leurs propos. L’écoute active adaptée favorise les échanges en évitant la confrontation et préserve ainsi leur dignité. Ce type de conversation se concentre sur la forme du dialogue plutôt que sur son contenu. Les réponses doivent être totalement positives – « C’est vrai! », « Tout à fait! », « Je suis d’accord avec vous » –, et ce, chaque fois que le patient cesse de parler. Il tirera beaucoup de plaisir de ces échanges, qui l’encourageront à exprimer ses émotions et renforceront son estime de soi.

Enfin, il faut se souvenir que certains patients souffrant de la maladie d’Alzheimer n’ont plus que leur comportement pour communiquer leurs besoins, car ils n’arrivent plus à trouver les bons mots. En tant que soignants, nous devons aussi être attentifs à notre comportement non verbal, qui en dit souvent plus long aux patients que nos paroles.


Philippe Voyer, inf. aut., Ph.D., est professeur titulaire à la faculté de sciences infirmières de l’Université laval et chercheur au centre d’excellence sur le vieillissement, à Québec. infirmier spécialisé en soins gériatriques, il fournit aussi des soins directs à des patients âgés.

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