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Planification préalable des soins : sept choses à savoir sur un processus souvent oublié

  
https://www.canadian-nurse.com/blogs/cn-content/2022/01/24/advance-care-planning-7-things-nurses-can-do-about

Conseils pratiques pour aider les patients et leurs proches

Jan 24, 2022, By: Lauren Thomas

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L’accompagnement des patients dans le choix d’un mandataire doit être un processus mûrement réfléchi. Qui réagit bien en contexte de crise ? Qui s’effondre? Qui est un bon défenseur? Qui ne l’est pas?

Messages à retenir

  • Apprenez ce qu’est vraiment la planification préalable des soins (PPS) et ce qu’elle n’est pas. Renseignez vous pour vous même. Informez-vous pour vos patients. Passez en revue la documentation particulière à votre province ou territoire : la loi et la terminologie peuvent varier d’un endroit à l’autre.
  • Comprenez que la PPS ne concerne pas seulement les patients atteints d’une maladie grave ou terminale, mais aussi les adultes en santé. Renseignez-vous sur ce que les adultes en santé peuvent et doivent prévoir. Entamez le dialogue avec les adultes en santé sur le processus de PPS.
  • Reconnaissez la nature interdisciplinaire et l’interdépendance des disciplines dans tout le processus de planification préalable des soins, mais assumez un rôle de leadership. Assurez le mentorat et l’encadrement de vos collègues infirmiers. Encouragez les médecins.
  • « L’intérêt d’entamer la discussion sur la planification préalable des soins … n’est pas de forcer des décisions prématurées sur les traitements possibles, mais plutôt de permettre aux patients de nommer un [mandataire] et de formuler leurs valeurs, qui pourront ensuite guider les décisions que d’autres prendront sur le moment. » [Traduction libre](Block et coll., 2020, p. 1-2)

J’étais infirmière depuis peu, dans un service chirurgical à haute acuité. Je me tenais au chevet d’un homme de 91 ans, inconscient après une chirurgie, et sa fille me dit : « Je n’ai aucune idée de ce qu’il faut faire, nous n’en avons jamais parlé. Je n’y ai jamais pensé. » J’étais abasourdie en regardant une ordonnance médicale vierge concernant la réanimation. Que faire?

La PPS est un processus qui permet aux adultes, quel que soit leur âge ou leur état de santé, de comprendre et d’exposer aux autres leurs valeurs personnelles, leurs objectifs de vie et leurs préférences concernant les soins médicaux à venir. La PPS aide les patients à recevoir les soins médicaux qui correspondent à leurs valeurs, à leurs objectifs et à leurs préférences pendant une maladie grave ou chronique (Sudore et coll., 2017).

La PPS est un concept multidimensionnel et mal compris depuis longtemps par la plupart des professionnels de la santé. Malgré l’évolution constante de la PPS au fil des ans, de nombreux facteurs perpétuent les mythes qui l’entourent. Trop longtemps, la PPS a été perçue à tort comme une conversation sur la mort et le mourir et sur la planification qui les entoure, ou comme une discussion qui doit rester entre les quatre murs d’un cabinet d’avocat.

Toutefois, le plus remarquable, selon moi, est le fait que ce sont généralement nos collègues qui nous renseignent sur la PPS, et qui l’ont appris d’autres collègues. On en entend très peu parler au sein des professions de la santé, à l’université ou, ensuite, par les employeurs. Et pourtant, la plupart d’entre nous commencent leur carrière en soins de courte durée, là où le « bât blesse ». Nos valeurs sont rudement mises à l’essai : au beau milieu d’une crise, nous devons prendre une décision urgente qui peut modifier le cours d’une vie.

Comment encadrer et soutenir une personne dans le respect de ses valeurs au moment de la prise de décisions en matière de soins? Cette question est d’une grande complexité. Elle est influencée par les normes culturelles sociétales et par le manque de partenariat entre les secteurs de la santé et du droit.

  • « Lorsque les gens réfléchissent sérieusement à leurs objectifs et à leurs valeurs, ils ont tendance à faire de meilleurs choix. » [Traduction libre] (People’s Law School, 2019, p. 3).

Pourquoi le personnel infirmier ne peut plus ignorer la PPS

Nous ne pouvons ignorer plus longtemps cette occasion de planification préalable. La nécessité de disposer d’un plan en matière de santé a éclaté au grand jour quand a débuté la pandémie de COVID 19 en 2020. Nous devons tirer parti de cette occasion. La COVID 19 soulève des « Je t’avais bien dit de te préparer », « J’aurais aimé que mon conjoint me le dise » et « J’aurais aimé savoir comment mes parents, mes frères et sœurs, mes enfants auraient voulu que j’intervienne ». Mais on se demande toujours comment entamer le dialogue dans ce processus de planification.

Le personnel infirmier est particulièrement bien placé et compétent pour accomplir ce travail. Nous accompagnons les gens tout au long de leur vie, de la santé à la maladie limitant l’espérance de vie, et ce, dans tous les milieux de soins. Le personnel infirmier joue un rôle crucial en tant qu’évaluateur-initiateur, éducateur-communicateur et défenseur. Mais comme toujours, nous devons d’abord évaluer notre propre niveau d’aise et de compétences : De quoi ai je besoin dans ma pratique pour accompagner les autres?

Par où commencer

  1. Se renseigner pour obtenir toutes les pièces manquantes

    Il vous manque probablement des connaissances sur les lois qui recoupent la PPS : le consentement, le consentement par procuration et les outils de planification en cas d’inaptitude. Chaque province et territoire applique des règles différentes.

    Quel lien y a-t-il entre la loi et la PPS? Une partie de ce processus consiste à déterminer qui parlerait au nom d’une personne qui ne peut pas exprimer ses souhaits. En tant qu’infirmière ou infirmier autorisé, prenez vous la peine de vérifier si vous obtenez le consentement de la bonne personne, conformément à la loi? Vous renseignez vous sur les documents de planification juridiques et sur les souhaits exprimés?

    L’accompagnement des patients dans le choix d’un mandataire doit être un processus mûrement réfléchi. Qui réagit bien en contexte de crise? Qui s’effondre? Qui est un bon défenseur? Qui ne l’est pas?

    Certaines provinces et certains territoires établissent une hiérarchie juridique des proches que les fournisseurs de soins de santé doivent suivre; d’autres non. Il y a des compétences à envisager et des responsabilités à assumer. Planification préalable des soins Canada met à votre disposition de la documentation et des outils pour en apprendre davantage sur les particularités provinciales et territoriales.

  2. Se préoccuper d’abord de soi même.

    Quel meilleur moyen d’orienter une autre personne et sa famille dans le processus que de le suivre soi même? Réfléchissez à vos valeurs. Qu’est ce qui donne un sens à votre vie et vous apporte de la joie?

    Renseignez-vous sur votre propre santé. Découvrez ce que pourrait vous réserver tout problème de santé dont vous souffrez actuellement.

    Nous ne pouvons ignorer plus longtemps cette occasion de planification préalable.

    Réfléchissez à la personne qui serait un bon mandataire si vous ne pouvez exprimer vos souhaits. Discutez de vos réflexions et de votre état de santé actuel avec votre mandataire et les autres personnes qui vous sont chères.

    Consignez toute cette information de la façon qui vous convient le mieux : par un média vidéo ou audio, par la poésie, par lettre ou par document juridique.

Accompagner ses patients et clients

Le personnel infirmier peut et doit évaluer les besoins en matière de PPS, sensibiliser le public à son sujet et la promouvoir. Voici quelques moyens essentiels pour soutenir tous les adultes.

  1. Aller droit au but, parler aux gens lorsqu’ils sont jeunes et en santé.

    La PPS ne concerne pas seulement les aînés et les malades. Ce n’est pas un plan de fin de vie. C’est un plan pour toute la vie d’adulte, et qui évolue selon les besoins. Ce devrait être une période de planification préalable proactive.

    Les adultes en santé peuvent et doivent se préparer en suivant certaines étapes. Il ne s’agit pas de forcer les gens à prendre des décisions prématurées sur les traitements potentiels. Personne ne connaît l’avenir, encore moins en ce qui concerne sa santé. Mais le personnel infirmier peut promouvoir et soutenir la réflexion des patients quant au choix d’un mandataire approprié, et les aider à exposer leurs valeurs à cette personne pour qu’elle soit prête, au besoin, le moment venu.

    Cela dit, on peut prévoir certains aspects. Par exemple, si le don d’organes est important pour le patient, encouragez le à prendre les dispositions nécessaires.

  2. Aider les gens à comprendre les implications d’une nouvelle maladie ou d’une maladie chronique

    Accompagnez les patients qui viennent de recevoir un diagnostic de maladie cardiaque, pulmonaire ou rénale dans leur questionnement et leur compréhension :

    • Quelles sont les conséquences de mon état de santé pour moi et pour ma vie?
    • À quoi ressemblera ma vie dans six mois, un an ou cinq ans?
    • À quelle autonomie puis je m’attendre?
    • À quels gros changements possibles de mon état de santé dois-je me préparer?
    • Que puis je espérer améliorer si je choisis ce traitement? Quels sont mes autres choix?
    • À quoi dois je m’attendre si je décide de ne subir aucun traitement?
    • Que se passera t il lorsque les traitements ne feront plus effet?

    Le fait d’inciter les patients à poser ces questions à leurs équipes interdisciplinaires (potentiellement multiples) leur permet de clarifier les choses et d’aborder l’avenir avec confiance.

  3. Ne pas reculer devant les conversations difficiles : elles sont essentielles et pertinentes

    La maladie évolue. Une fois qu’un patient en est à sa dernière ou ses deux dernières années de vie, aidez le à répondre à certaines questions qui aideront l’équipe soignante à formuler des recommandations de traitement adéquates sur le plan médical et conformes aux valeurs du patient. Demandez-lui :

    • Quels sont vos objectifs les plus importants si votre état de santé se détériore?
    • Quelles sont vos plus grandes craintes et inquiétudes quant à l’avenir étant donné votre santé?
    • Qu’est-ce qui vous donne du courage lorsque vous songez à l’avenir étant donné votre maladie?
    • Quelles capacités sont si essentielles à votre vie que vous ne pouvez pas imaginer vivre sans elles?
    • Si votre maladie s’aggrave, quelles autres épreuves seriez vous prêt à traverser pour la possibilité de vivre plus longtemps? (Ariadne Labs, 2017)
  4. Éviter de poser des questions binaires

    Quand on pose des questions binaires, on obtient des réponses binaires. Il ne sert à rien de demander : « Voulez vous qu’on vous réanime? » ou « Voulez-vous qu’on réanime vos proches? ». Commencez par « Pourquoi voulez vous vous porter mieux? » Dès que l’équipe soignante connaît la réponse et ce qui est indiqué sur le plan médical, elle peut formuler des recommandations et un plan de soins axé sur le patient.

    Expliquez aux patients ce qu’on leur propose (ce qui est indiqué sur le plan médical), ce qu’on ne leur propose pas (ce qui n’est pas indiqué sur le plan médical) et pourquoi.

  5. Annoncer les mauvaises nouvelles. Simplement.

    Tous les professionnels de la santé ont leur place dans les conversations sur le pronostic du patient, et les collègues et les disciplines partagent cette responsabilité. Le personnel infirmier est en mesure d’aider à transmettre cette information d’une façon adaptée à la maladie du patient.

    Toutes les maladies ne sont pas facilement prévisibles. Mais nous reconnaissons les changements lorsque nous les voyons; il en va de même pour les intervenants en physiothérapie, en ergothérapie, en pharmacie, en diététique et en travail social. Nous avons l’obligation de transmettre cette information au patient (s’il le désire) et aux autres membres de l’équipe soignante.

Références

Block, B. L., Smith, A. K., et Sudore, R. L. « During COVID-19, outpatient advance care planning is imperative: We need all hands on deck », Journal of the American Geriatrics Society, 68(7), 2020, p. 1395 1397. https://doi.org/10.1111/jgs.16532

People’s Law School. (2019). Planning for your future. https://assets.ctfassets.net/wzm83lc7g93q/1IBfXaELcQ16RIaoNYHgKI/e4590f51e78b44fe87a54696df37f6f1/booklet_-_planning_for_your_future_-_2019.pdf

Ariadne Labs. Serious illness conversation guide, 2017. http://www.ariadnelabs.org/resources/?fwp_areas_of_work=serious-illness-care&fwp_resource_type=download [connexion requise].

Sudore, R. L., Lum, H. D., You, J., Hanson, L., Meier, D., Pantilat, S., Matlock, D., Rietjens, J., Korfage, I., Ritchie, C., Kutner, J., Teno, J., Thomas, J., McMahan, R. et Heyland, D. K. « Defining advance care planning for adults: A consensus definition from a multidisciplinary Delphi panel », Journal of Pain and Symptom Management, 53(5), 2017, p. 821 832. doi.org/10.1016/j.jpainsymman.2016.12.331


Lauren Thomas, inf. aut., B. Sc. inf., est infirmière en planification préalable des soins au sein de l’équipe de planification préalable des soins de la régie de la santé de la vallée du Fraser, en Colombie Britannique.

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